Pour la première fois de ma vie, on m’a demandé d’assurer la direction artistique d’un gros spectacle concept. J’avais déjà touché d’une certaine manière à la direction artistique, ne serait-ce que pour notre propre projet Geneviève et Alain ou bien dans des contextes de spectacles plus amateurs ou d’artistes de la relève.
Là, c’était pour de vrai de vrai.
L’objectif était de monter un show réunissant des artistes de la région de la capitale nationale, autant d’Ottawa que de Gatineau, autant francophones qu’anglophones. Le show allait être présenté sur une des 2 grosses scènes de l’organisation de Patrimoine Canada pour le jour de la Fête du Canada à Ottawa.
Quand on me l’a proposé, au départ, mon premier réflexe, ça a été de dire non. Je pensais à tous les directeurs et directrices artistiques avec lesquels j’avais déjà travaillé auparavant et j’ai tellement d’admiration pour eux que mon feeling, c’était que je ne leur arriverais jamais à la cheville.
J’étais comme : « Pourquoi tu demandes pas à elle à la place? Ce serait bin meilleur! »
Heureusement, le producteur du show m’a demandé de dormir là-dessus et de lui revenir avec une réponse dans les prochains jours.
J’ai dormi là-dessus en tabarouette! J’ai dû rêver à ça toute la nuit! J’étais tellement fébrile que le lendemain, j’avais déjà tout plein d’idées de concepts et j’avais même déjà fait un gros document Excel avec une loooongue liste de tous les artistes potentiels provenant ou habitant dans la région.
J’ai envoyé ce document-là en guise de réponse.
La job était déjà commencée.
On s’est ensuite fait une couple de réunions pour faire le choix final des artistes en équilibrant du mieux possibles anglais/français, Gatineau/Ottawa, féminin/masculin, styles musicaux, etc.
Une fois les artistes approuvés par Patrimoine Canada, on a demandé à chacun d’eux de nous envoyer un top 5 des chansons qu’ils aimeraient interpréter, en privilégiant les plus up-tempo. (Quand on joue à l’extérieur dans un contexte de célébration et quand on sait aussi que le public se tiendra debout, on veut souvent mettre de l’avant les chansons les plus festives.)
J’ai choisi 3 chansons par artistes.
3 tounes X 5 artistes, ça donnait exactement le 60 à 75 min de spectacle demandé.
On valide avec tout le monde, on récupère les paroles et les partitions et on plonge.
2 petites particularités :
-On s’était AUSSI fait demander de faire partie du spectacle. Donc dans les 5 artistes, ça comprenait Geneviève et Alain. Je suis d’Ottawa et Alain de Gatineau, donc on fitait parfaitement dans le concept.
-Parmi les 5 artistes, il y avait aussi un band (chanteurs/guitare/basse/drum). On leur a demandé en plus d’assurer la partie musicale de tout le reste du show, au lieu de faire appel à des musiciens supplémentaires en tant que house band.
L’idée, c’était que, le temps d’un seul spectacle, les 5 artistes ne forment qu’un seul grand band. Un peu pour donner l’image d’unir les frontières et les langues. D’ailleurs, le show s’appelait Entre 2 rives et était présenté sur le bord de la rivière des Outaouais, qui marque la séparation entre les provinces.
Au lieu de créer des numéros de groupe au début et à la fin du show, j’ai préféré tenter d’intégrer chacun sur les chansons des autres le plus possible tout au long du show. Ma consigne, c’était qu’au moins une chanson par artiste devait réunir tout le monde sur scène. Donc au moins 5 numéros de groupe + d’autres collaborations quand ça adonnait.
Le hic, c’est que c’était impossible de se réunir pour répéter d’avance. On n’avait qu’une seule répétition de programmée : la veille de la représentation.
Alors j’ai demandé au band de s’enregistrer à la fin de leurs répétitions et de nous envoyer le tout 2 semaines d’avance pour qu’on puisse pratiquer chacun chez nous à partir de leurs arrangements.
De mon côté, je me suis occupée de toute la partie vocale du show. Donc, j’ai surtout fait un travail de repiquage de chœurs pour distribuer les harmonies. Pour chaque chanson, j’ai enregistré toutes les voix individuellement pour les envoyer à chaque artiste. Comme ça, ils étaient en mesure de tout apprendre chez eux avant la répétition.
On a déterminé la plantation sur scène (la disposition de tout le monde).
Ensuite, j’ai choisi l’ordre des chansons, en alternant souvent les artistes pour garder cet esprit d’unité et éviter que chaque artiste ait juste un « bloc » dans le show.
J’ai écrit et proposé des interactions entre les chansons et j’ai déterminé qui présentait quoi à tel ou tel moment du show.
Ensuite, ça a beaucoup été du travail d’adaptation et de communication pour s’assurer que tout le monde était correct, à l’aise et avancé dans sa pratique, puis pour répondre le plus possible aux besoins de chacun.
Pour le reste, je me croisais les doigts pour qu’à la répétition, en assemblant tous les morceaux, ça fonctionne.
Je te cacherai pas qu’il y a eu quelques jolies péripéties hors de mon contrôle au cours de cette journée-là qui m’ont fait vivre des montagnes russes d’émotions. Rien par rapport à ce que j’avais préparé (heureusement, pour ça, tout a bien été!), seulement une poignée d’imprévus externes.
Je souhaitais tellement faire vivre une expérience impeccable à tout le monde qu’à chaque fois qu’il y avait un petit quelque chose, ça me mettait à l’envers!
J’avoue qu’après cette journée-là, je suis revenue à la maison les yeux pleins d’eau.
À cause des imprévus, on n’avait À PEINE eu le temps de pratiquer le show d’un bout à l’autre.
On a vraiment manqué de temps.
Honnêtement, j’avais aucune idée à quoi le show allait ressembler le lendemain.
Mauvaise générale, bon show???
Ça faisait longtemps que je l’avais pas vécue pour vrai cette citation-là!
Eh bin tu sais quoi? On était avec des artistes tellement pro que quand on est montés sur scène, tout le monde a livré la marchandise comme si c’était la 10e fois qu’on faisait ce show-là.
On a eu de superbes commentaires du public. Que des bons en fait.
Je suis vraiment reconnaissante d’avoir été si bien entourée.
Même si j’ai rarement été aussi soulagée d’avoir terminé un spectacle.
J’ai appris beaucoup.
C’était pas juste facile.
Mais je le referais demain matin.